A l’occasion de la Journée de l’Europe, la Ligue s’engage, face à la tentation du repli nationaliste, pour une Europe plus forte et solidaire autour de quatre priorités : la transition écologique ; la recherche, l’innovation, l’éducation et la jeunesse ; l’Europe sociale ; les migrations et l’asile.
Jamais les élections européennes ne se sont déroulées dans un contexte aussi incertain, voire angoissant pour toutes celles et ceux qui croient en une Europe protectrice, émancipatrice et sociale.
En effet, c’est à un moment de basculement voire de régression, que nous sommes confrontés. Après la reconstruction d’un continent dévasté autour d’un idéal de paix et de prospérité, après un processus d’élargissement progressif, on assiste pour la première fois à un retrait, celui du Royaume-Uni, et au danger de voir devenir majoritaires au Parlement européen des forces politiques nationalistes, hostiles à l’idée européenne, et qui, dans leur pays, piétinent les valeurs de solidarité et cultivent la haine de l’étranger.
Cette Europe est souvent ressentie comme un bouc émissaire commode pour des États membres cherchant à se dédouaner devant leurs opinions publiques. Il faut reconnaître que les propres turpitudes de l’Union qui, souvent, adopte un langage, des règles ou des postures technocratiques, ne contribuent pas à un rapprochement avec les peuples qui la composent.
Dans ce contexte, il faut plus que jamais faire face aux exploiteurs de colère qui prospèrent à coups de fake news, faire face aussi à ceux qui prônent un repli nationaliste, néfaste en soi, et qui, de surcroît, ne répond en rien aux stratégies agressives des grandes puissances d’aujourd’hui et de demain, faire face enfin à ceux qui ne conçoivent l’Europe que comme un grand marché sans régulation, régi par la concurrence pure et parfaite.
L’Europe n’est pas une institution gravée dans le marbre du libéralisme et d’un marché libre et non faussé. Elle est un projet en construction dont les peuples doivent s’emparer pour construire une Europe de paix, de justice sociale et respectueuse de l’environnement. Leur adhésion à ce nouveau projet collectif ne se fera qu’au prix d’un renouvellement profond des instances et de leur mode de désignation.
Après le Brexit et l’élection de gouvernements antieuropéens dans plusieurs pays membres, la Ligue de l’enseignement défend la perspective d’une Europe plus souveraine, plus démocratique, plus ouverte, plus sociale. Nous pensons aussi que l’avenir de l’Europe passe par plus d’intégration, par un saut fédéraliste qui reste conditionné par un budget très largement renforcé, alimenté par de nouvelles contributions sur les gros patrimoines et sur les bénéfices des sociétés, ainsi que sur les émissions carbone.
Parmi les politiques européennes à prioriser, quatre nous apparaissent essentielles :
- La transition écologique : fondamentale et urgente, cette question ne peut être mise en œuvre qu’avec un complément massif de l’Europe aux politiques nationales. Les énormes investissements indispensables pour atteindre les objectifs fixés par les accords de Paris doivent être financés à la fois par le budget européen et par une banque européenne pour le climat proposée par de nombreuses voix (Pacte Finance Climat). Les investissements nationaux dans ce domaine pourraient par ailleurs être exclus des critères budgétaires auxquels sont soumis les États membres.
- La recherche, l’innovation, l’éducation et la jeunesse : en matière d’innovation et de recherche, notamment sur les thèmes cruciaux d’avenir tels que l’intelligence artificielle, l’Europe doit se doter de moyens comparables à ceux des grandes puissances. Tous les programmes d’échanges, d’engagement européen et de mobilité des jeunes méritent d’être considérablement renforcés pour imprégner la jeunesse européenne d’un fort sentiment d’appartenance à l’Union.
- L’Europe sociale : le règlement définitif du statut des travailleurs détachés, l’arrêt de la concurrence fiscale qui, en 40 ans, a entraîné une division par 2 du taux moyen d’impôt sur les bénéfices, la création d’un salaire minimum européen adapté à chaque pays, pourraient constituer les premiers pas d’une Europe sociale en construction. Celle-ci doit par ailleurs garantir la protection des services d’intérêt général (services publics, associations) et les extraire du champ concurrentiel.
- Les migrations, l’asile et la protection des frontières : au centre de la campagne pour les élections européennes, ce sujet revêt une importance capitale pour la Ligue de l’enseignement car il touche aux fondements de notre engagement. Le défi migratoire est un défi moral et politique qui interroge l’identité européenne. Nous reprenons à notre compte les conclusions d’un travail commun engagé avec une dizaine d’associations et coordonné par le think tank L’Avenir n’attend pas visant à la construction d’une politique migratoire commune, établissant des règles claires et se dotant des moyens de les faire respecter.
Une telle politique ne peut être unilatérale et doit s’accompagner d’une politique européenne commune fortement renforcée en direction de l’Afrique notamment, en termes d’investissements, d’éducation et de santé…
Nous souhaitons que les élections européennes à venir contribuent à la refondation politique, sociale et environnementale de l’Europe. La Ligue de l’enseignement, ses fédérations et associations y seront attentives.
La Ligue reprend à son compte, en outre, les plaidoyers élaborés dans le cadre des collectifs auxquels elle adhère :