Une récente émission de « C à vous » sur France 5 était consacrée au thème : « Terrorisme : la menace sous les radars ». Parmi les intervenantes, Caroline Fourest a évoqué « la Ligue de l’enseignement qui fait dans l’éducation populaire subventionnée et qui flatte la propagande contre l’islamophobie » ! La veille, sur RMC, l’ancien premier ministre Manuel Valls avait proféré de semblables accusations contre la Ligue de l’enseignement.
Une demande d’information auprès de nous, ou une simple consultation de notre site ou notre édition « Laïcité » leur aurait permis de connaître les positions publiques de la Ligue de l’enseignement. Ce sont les seules qui engagent notre mouvement d’éducation populaire.
Notre document le plus récent, « La laïcité, une émancipation en actes », est explicite : « Critiquer l’islam est donc parfaitement légitime et ne dérive pas obligatoirement en comportement islamophobe. Le terme même d’« islamophobie» doit être employé avec prudence car il peut aussi bien désigner la libre remise en question d’une religion que le masque d’un racisme qui ne dit pas son nom ».
En 2018, la Ligue de l’enseignement a présidé le Comité national d’action Laïque (CNAL) et à ce titre a piloté une grande enquête en collaboration avec l’IFOP « La Laïcité à l’école, les enseignants ont la parole ». Cette étude fait autorité et est très souvent citée ou utilisée. La conclusion de l’enquête, disponible sur le site du CNAL, montre que si les enseignants nous disent que si la situation est globalement apaisée à l’école, ils alertent également sur « L’omniprésence de la religion réelle dans certains territoires. Il y a chez certains une incontestable instrumentalisation du religieux pour essayer de se soustraire aux lois de la République et imposer leur organisation communautariste. Certes, il faut faire attention à une laïcité à tête chercheuse qui ne viserait que l’islam, il faut certes aussi faire attention à ne pas toujours ressasser les mêmes incidents qui donnent une vision déformée de la réalité, mais l’enquête du CNAL ne met pas la poussière sous le tapis. Il existe une forte pression religieuse sur certains territoires qui pèse sur les familles et les élèves, et qui pèse donc sur l’école publique et ses personnels. Et si cela ne doit pas conduire à sous-estimer les pressions des autres religions, notre étude met en évidence une tension particulière avec certains de nos concitoyens de confession musulmane ». La Ligue de l’enseignement assume sans ambiguïté cette position.
De même, la position de la Ligue sur la liberté d’expression est illustrée par de nombreux articles qui sont en ligne dans notre édition « Laïcité ». Cette défense inclut le droit au « blasphème » pour lequel nous faisons campagne dans le cadre de l’ONG « Humanists International » qui regroupe une centaine d’organisations laïques dans le monde. En janvier 2015, notre soutien aux dessinateurs de Charlie et à toutes les victimes a été immédiat et sans réserves. Lors des Rencontres laïques organisées le 5 juin 2019, avec une trentaine d’organisations représentées, la Ligue de l’enseignement a consacré une journée à la défense de la liberté d’expression sous toutes ses formes. Les vidéos des contributions sont en ligne.
Nous regrettons enfin que l’allusion à « l’éducation populaire subventionnée » semble contester à la fois l’action conduite par la Ligue et ses fédérations départementales et le partenariat de la Ligue de l’enseignement avec plusieurs ministères de la République.
Rappelons que des formations sont dispensées régulièrement par nos militants dans le cadre de nos nombreuses associations, que des guides ont été édités sur la laïcité dans les séjours de vacances, dans les restaurations collectives ou dans les pratiques sportives, que des outils pédagogiques et éducatifs, des informations, des articles, des tribunes, des documents sont publiés régulièrement par et dans notre réseau et hors de notre mouvement. Ce travail de fond de la Ligue de l’enseignement en faveur de la laïcité, et donc du bien public et du lien social, dure depuis plus de 150 ans. Il implique des dizaines de milliers d’associations et des centaines de milliers de membres dans des actions culturelles, sociales et sportives. Bien qu’il soit très rarement présenté dans les médias, il contribue de façon notable à faire société. Est-ce bien le moment de demander d’y mettre fin ?